Les variations Goldberg

Glenn Gould (dont on a déjà beaucoup parlé sur ce blog) n’aimait pas les dernières oeuvres de Mozart (il disait d’ailleurs qu’il était « mort trop tard ») mais il aimait Petula Clark (si si !) et surtout Bach. Il aura consacré une bonne partie de sa vie à Jean-Sébastien Bach et les interprétations de son répertoire sont restées dans les annales.

Je vous propose de le retrouver aujourd’hui dans les fameuses Variations Goldberg de Bach. Glenn Gould a enregistré deux fois cette oeuvre : en 1956 (interprétation qui marque le début de sa gloire) et en 1981. C’est cette dernière version que je vous propose, enregistrée peu de temps avant la mort de l’artiste. On le retrouve ici sur sa fameuse chaise pliante (dont il a scié les pieds pour être à la hauteur du piano et qui l’accompagnera toute sa vie, même délabrée).

Bon week-end à tous !

38 réflexions au sujet de “Les variations Goldberg”

  1. En tendant l’ oreille, on entends l’ami Glenn chantonner et soupirer ! C’est comme ça dans tous ses enregistrements ! :silly:
    C’est ce qu’on appelle vivre sa musique … :wink:

  2. Pour une musique aussi complexe, comment peut-on se souvenir de dizaines de milliers de notes sans avoir de partition devant les yeux ? :blink:

  3. Un conseil de lecture …
    La rivière et son secret de Zhu Xiao-Mei.
    C’est un livre exceptionnel dans lequel vous entendrez beaucoup parler des variations Goldberg (entre autres).
    Cette lecture m’avait été conseillée à l’époque par un certain … Dupdup ! :smile:

  4. 47 minutes de piano tout en navigant de site en site. La journée démarre mieux que celle d’hier. Merci Bernard!

  5. « Pour une musique aussi complexe, comment peut-on se souvenir de dizaines de milliers de notes sans avoir de partition devant les yeux ? »
    C’est que le cerveau est un organe capable de performances inouïes. La plupart des gens n’en ont pas conscience. :blink:
    Il y a aussi et surtout derrière tout cela un travail énorme. Tout le monde est capable de jouer plus ou moins bien, peu de personnes sont véritablement capables d’interpréter. Les génies sont souvent de très gros travailleurs.
    En particulier, la performance du « gros plein de notes » n’est pas banale non plus, lui qui était capable de composer une cantate par semaine… Hallucinant. :wassat:

  6. On sait que Gould était un personnage malade. Voici ce qu’en dit Wikipedia :

    Selon l’étude du psychiatre américain Peter Ostwald4 reprise par S. Timothy Maloney, directeur de la division de la musique de la Bibliothèque nationale du Canada5, Glenn Gould aurait été sujet d’une forme d’autisme dénommée le syndrome d’Asperger. Plusieurs points étayeraient cette thèse :
    – La disproportion des sens : hypersensibilité de l’ouïe, de la vue et du toucher doublée d’une insensibilité du goût et de l’odorat.
    – Routines vestimentaire, alimentaire et répétition de codes, de rituels tout au long de sa vie. Il regardait quarante fois le même film ou écoutait une suite de musiques pendant des mois. Par exemple, il trempait toujours ses bras dans l’eau très chaude avant un concert, et refusait l’idée même de se séparer de sa chaise pliante sciée. Il mangeait le même repas (œuf brouillé, pain grillé, salade et biscuit) chaque jour.
    – Comportement social très difficile, et refus de l’interaction humaine au point de préférer la compagnie des animaux.
    – Attitude physique et répétition de geste, typique de ce comportement.
    Manque de discernement (on a parlé à son sujet de manque de courtoisie), doublé d’une incroyable faculté mémorielle.
    S. Timothy Maloney écrit : « Glenn Gould mérite notre profonde sympathie pour s’être si bien débrouillé, ainsi que notre profonde admiration pour avoir développé et mis en œuvre, face à l’incompréhension et à l’opprobre générales, tant de techniques pour s’en sortir sans l’intervention ni le soutien d’autrui. Indépendamment de ses réalisations professionnelles exceptionnelles, ses réalisations personnelles représentent un véritable triomphe de l’esprit ».

  7. On peut ajouter que les variations Goldberg sont une œuvre maîtresse de Bach et que Glenn Gould en donne dans ce coffret deux versions qui sont aux antipodes l’une de l’autre: l’une qui date de 1955 qui est fougueuse, rapide et exaltée et l’autre qui est de 1981 et qui peut être considérée comme le « chant du cygne recueilli », tellement Gould y est apaisé. Deux versions magnifiques!

  8. Bienvenue à toi Régis sur ce blog.
    Dans la musique pour clavier de Bach, ces variations Goldberg sont sans doute l’oeuvre maîtresse de Bach (avec l’Art de la fugue). Je les découvre en ce moment par d’autres interprètes : Murray Perahia au piano et Marco Salcito qui en a fait une transcription pour guitare (je ne savais pas qu’il existait une version pour guitare de ces variations). Que du bonheur ! :wub:

  9. Deux précisions concernant le disque de Marco Salcito :
    – il s’agit plus d’adaptation que de transcription, d’ailleurs les morceaux sont plus longues (deux CD au lieu d’un seul en général pour ces variations) ;
    – on peut écouter des extraits de chacune des variations sur cette page.

  10. Dans l’un des commentaires ci-dessus, Etincelle parle de la pianiste chinoise Zhu Xiao-Mei qui a écrit un livre fabuleux dans lequel on parle énormément des variations goldberg. Voici cette pianiste hors pair dans l’interprétation de cette oeuvre :

    (je crois que Brind’paille a vu le même concert à Dijon)

  11. Merci Bernard de me donner l’occasion de dire tout le mal que je pense des variations Karlsberg et en particulier les interprétations de ton autiste préféré. Fondamentalement, je ne reconnais pas Bach (de bières) dans ces variations auxquelles je ne comprends rien. Je trouve cette musique ennuyante à mourir, elle ne me parait pas aller plus loin qu’un pur exercice de style et Machine man plus que n’importe quel autre interprète me glace le sang. J’en ai déjà acheté 4 versions me disant que si cette œuvre est à ce point vénérée c’est qu’il y a des raisons… qui m’échappent. Terminé, je ne cherche plus..
    J’ai écouté les premières notes de Zhu Xiao-Mei. Elle me donnent l’impression d’être plus écoutables que ce que j’ai déjà entendu, mais alors il faudra que j’aille plus loin dans le concert tellement à force d’avoir essayé, je les entends comme l’hymne à la joie, insupportable comme la « danse des canards », ces petits air qui vous envahissent la tête à en devenir fou après trois jours sans rémission. :devil:

  12. En mettant ce commentaire hier soir sur le blog, j’espérais que tu donnerais ton point de vue sur l’oeuvre, vu qu’on en a discuté ensemble de vive voix à la maison il y a quelques jours.
    Il y a, pour moi aussi, des oeuvres auxquelles je comprends mal l’engouement général (dans Mozart par exemple). Hier soir, je regardais un concerto pour violon de Bartok sur mezzo HD. Juste après il y avait le final de la 9ème de Beethoven (l’hymne à la joie). J’ai vite éteint … !
    Des goûts et des couleurs !

  13. La manière même d’appréhender la musique peut varier dans le temps. A 15-16 ans, seul dans ma chambre, je dirigeais l’entièreté du Tannhauser de Wagner et 5 ou 6 symphonies de Beethoven. La musique signifiait d’abord symphonie! Maintenant, je n’aime plus. Ce que je cherche dans la musique se trouve ailleurs que dans la mélodie, les harmonies et la sensibilité émotionnelle à fleur de peau. (Mais qu’est ce que ça veut dire, est-ce vraiment l’apanage du romantisme?) Je me sens bien dans l’inattendu, et surtout que trois notes ne me dévoilent pas à elles seules, la quatrième!
    Je sens confusément que les variations Goldberg est un travail qui va pourtant dans ce sens. Pourrait-on faire un parallèle entre cette musique et le jazz? Scarlatti a beaucoup travailler cette approche de la musique qui laissait une grande part de liberté au pianiste. Mais avec les variations, ma difficulté est que je ne sais pas comment les écouter et les laisser venir m’amène irrémédiablement à l’endormissement… :smile:

  14. Tu parles « d’inattendu ». Il me semble qu’à force d’écouter de la musique dans plein de genre différents, plus rien (ou presque) ne surprend. Même dans le jazz. Mais ça ne m’étonne pas car tout (ou presque) a été dit. Comment réinventer la musique aujourd’hui ? Ce n’est pas tous les jours qu’on invente de nouvelles musiques. Même pas toutes les décennies. Alors que faire, quoi écouter ? Pour l’instant, les seules musiques dans lesquelles j’arrive à être encore étonné sont soit de l’âge du baroque (y compris chez certains compositeurs considérés comme mineurs ; merci au fait d’avoir parlé de Scarlatti, il y a chez lui une sorte de folie débridée et communicative) soit d’Asie (je n’en parle jamais sur ce blog mais les musiques du sud-est asiatique font partie des musiques que j’écoute le plus).
    Il y a donc tellement peu de chances d’avoir de l’inattendu dans la production actuelle qu’il faut mieux trouver son plaisir ailleurs que dans la surprise. Et mon plaisir quotidien dans la musique est ailleurs que dans l’inattendu. Il faut peut-être chercher du plaisir musical notamment dans ce que tu n’aimes pas : la mélodie, les harmonies, la sensibilité émotionnelle. ça reste des valeurs sures !

  15. Luc, certaines musiques t’amènent « irrémédiablement à l’endormissement ». C’est déjà pas mal ! :whistle: :tongue: :devil:

  16. Luc, je partage entièrement ce que tu dis sur l’âge et sur les symphonies (et, par extension, on pourrait dire aussi « les grands concertos romantiques »). Les symphonies (ou les ouvertures grandioses d’opéras comme Tannhaüser) correspondent à des choses puissantes qu’on a en nous lorsqu’on est jeune. En vieillissant, on a besoin de choses bien plus nuancées, plus délicates, moins « tape à l’oeil », alors la musique de chambre convient mieux. Et la musique de chambre, c’est finalement juste un dialogue entre quelques instruments. C’est un peu comme les personnes qui dialoguent sur ce blog qui ne sont pas nombreuses à discuter ensemble d’un sujet mais qui se satisfont largement de ce côté « pas nombreux » (voire intime). Pour faire un autre parallèle, c’est un peu aussi comme lorsqu’on vieillit et qu’on se recentre sur ses proches plutôt que sur le collectif (dont, d’une certaine manière, on n’a parfois plus rien à foutre, vu qu’on a déjà donné).
    Les proches, c’est un petit groupe (à l’image de la musique de chambre).
    Le collectif, c’est les symphonies avec leur centaine d’instrumentistes.
    Tous les amis que je connais et qui écoutent beaucoup de musiques évoluent au fil de leur vie dans leurs choix musicaux. Evidemment, l’adolescence étant une période extrêmement marquante, on en revient forcément de temps en temps à ses amours musicaux de jeunesse, le rock notamment en ce qui me concerne.
    Tiens, d’ailleurs, alors que j’étais sur le point d’écouter un lieder de Schubert (« le chant du cygne »), je vais m’écouter un vieux Clash !!!!!!!!!!!!!!!!! :smile:

  17. Le meilleur choix je pense en ce qui concerne les Clash.
    Comme j’ai écouté par hasard une autre pépite de ce groupe hier, je la partage.

    Sinon, si on aime rien qu’un peu le rock, le punk, et surtout beaucoup la musique, London Calling c’est un des plus grands albums de tous les temps, avec plein d’influences musicales.

    Les variations Goldberg, je sais pas, mais avec l’éclairage de Luc, je vais peut-être comprendre pourquoi je n’arrive jamais à écouter longtemps et encore et encore.
    En tout cas, j’aime bien ton illustration de la quatrième note, l’inattendue… et je crois que c’est tout le sel de la vie : une petite trouvaille dans la routine, qu’elle soit virtuose ou banale, un petit arrière-goût de reviens-y t’as pas tout compris. :smile:

  18. Le problème, c’est que la surprise de la 4ème note inattendue, ce n’est une surprise qu’à la première écoute. Alors, s’il ne faut écouter le disque qu’une seule fois, bof bof … :angry:
    Non, le plaisir de l’écoute est vraiment ailleurs …
    Tiens, par exemple, pourquoi les premières notes des variations goldberg me font toujours le même effet, même au bout de 50 écoutes ? ça c’est un mystère et pour moi la magie de la musique est dans cet effet qui perdure malgré le nombre d’écoutes.

  19. Avant-hier, en roulant en voiture, Joëlle et moi avons entendu sur France-Musique une version – sans doute rare – des variations Goldberg transcrites pour cordes. Elles étaient interprétées par le trio Jean-Baptiste Vuillaume. J’ai gardé en mémoire le nom pour faire une recherche. J’ai eu un peu de mal et finalement je trouve à l’instant une vidéo de cet ensemble pour cordes justement dans l’interprétation des variations goldberg.

  20. Je voudrais acquérir l’intégral des sonates pour piano de Beethoven. Quelqu’un a-t-il des propositions de pianistes à me faire?
    J’ai bien dit pianiste, pas machinistes… :wink:

  21. Il y a des tas de versions et je connais pas mal de disques de sonates par Alfred Brendel, Maurizio Pollini, Wilhelm Kempff, Emil Gilels, Claudio Arrau, …
    Il me semble que lorsqu’on va chez de tels artistes, dont les versions sont passées à la postérité malgré l’épreuve du temps qui passe, il y a peu de risques de tomber sur quelque chose qui ne plaît pas. On était sans doute plus poète que technicien à l’époque. Perso, en plus de quelques disques éparpillés (noms cités ci-dessus), j’ai l’intégrale d’un grand pianiste, Friedrich Gulda, qui date des années 60 et j’en suis ravi. D’ailleurs, tiens, je vais m’en mettre un sur la platine …
    J’ajouterais que le mieux, avant d’acheter, est encore d’écouter avec deezer, spotify ou google play.
    L’avis des auditeurs (par exemple sur amazon) peut être très utile.

  22. Hans von Bülow disait que ces 32 sonates de Beethoven constituaient le nouveau testament de la musique, le « clavier bien tempéré » de Bach étant, quant à lui, l’ancien testament. Ce sont en tous les cas deux sommets de la musique, tous genres confondus.

  23. Je pense que quand il s’agit d’intégrale, il vaut mieux acquérir les différents morceaux par des artistes différents. Il est rare qu’un seul interprète soit capable de transcender l’ensemble d’une oeuvre de manière égale, et les sonates de Ludwig sont, en l’occurrence, un véritable monument… :cwy:
    Après c’est comme les goûts et les couleurs et, personnellement, je serais bien en peine de conseiller telle ou telle interprétation… :wink:
    Les pianistes cités par Bernard sont de merveilleux artistes, il aurait pu aussi citer un autre géant, S.Richter et quelques dames magnifiques, Brigitte Angerer, Martha Argerich, Vanessa Wagner et quelques jeunettes qui promettent… Je ne cite pas la divine Maria-Jao Pires dont le jeu subtil sert à merveille le non moins divin Mozart…
    Bon courage ! :smile:

  24. J’écoute pour le moment ces sonates jouées par Barenboim. Et Juste avant, Hélène Grimaud, et encore avant, heu, je ne sais plus mais l’enregistrement trop ancien me dérangeait. Difficile de choisir. Cette musique est fantastique. D’un richesse et d’une sensibilité extraordinaire. Comme j’ai repris l’écriture, j’espère que la musique de Bête au vent déteindra dessus! :smile: on peut rêver…

  25. Et pis tiens, je vais faire la promo de deux petits jeunes que j’ai connu, l’un, fils d’un collègue, Guillaume Coppola et l’autre Tristan Pfaaf (j’espère que je n’écorche pas son nom !) qui a bossé avec mes gamines il y a quelques années. Tous les deux commencent à faire parler d’eux. Guillaume a déjà sortis deux disques (peut-être plus ? Je ne suis plus depuis quelques temps… :blush: )
    Mais je doute qu’il se soient attaqué à une intégrale … :wink:
    Ah ! Pis j’allais oublier Alexandre Tarhaud qui n’est pas mal du tout… :silly:
    L’écriture, musicale ?

  26. Non, littéraire.
    Merci à vous pour tout ces noms, n’en rajoutez plus, j’en ai pour des jours et des nuits! :smile: :wub:

  27. Une découverte musicale que je classe ici avec un autre pianiste atypique.
    Chilly Gonzales alias Jason Beck.
    D’abord un morceau

    Et un concert ébouriffant parmi d’autres.

  28. Ce knight move, (le 2eme est censuré) je l’ai réécouté les yeux fermés. J’ai été initié au classique ,enfant, par les disques de mon père. Pour moi, il n’y avait pas de musiciens la dedans, juste de la musique; je n’étais pas vraiment sous le charme et je tentais de me faire des films pour ne pas m’ennuyer. Avec Wagner et les walkyries ça allait tout seul! Pareil pour Moussorgski et sa nuit sur le mont chauve…..
    Là,aujourd’hui, avec cette course folle (sans but) du cavalier- c’est ma traduction approximative-je suis retombé en enfance . Le cavalier m’est apparu plus indien que cow boy , traversant des mondes différents (avec des références musicales peut-être ?)
    et à la fin s’est envolé sur cheval ailé, façon Harry Poter ou mieux, Pégase, et j’étais sous le charme, cette fois. Merci pour la découverte.
    Par contre en fouinant sur les vidéos proposées qui suivent, j’ai trouvé le bonhomme et ce qu’il dit, rigolos et intéressants, notamment sur la musique de fond:

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