Emplois jeunes et emplois d’avenir

Je suis toujours estomaqué par la manière dont les journalistes nous disent les choses. Un chiffre peut être présenté de plusieurs manières différentes selon ce qu’on veut lui faire dire. Ainsi, Samuel Laurent, dans leMonde.fr nous parle des emplois d’avenir et revient sur le dispositif emplois-jeunes qui avait été mis en place en 1999.

Il nous dit ceci : « Mais ces emplois jeunes, qui devaient aider les  plus en difficulté, ont beaucoup bénéficié à de jeunes diplômés : près de 20% avaient fait plus de deux ans d’études après le bac. ». N’aurait-il pas été plus juste de dire, en commentant le même chiffre : « Ces emplois jeunes, qui devaient aider les plus en difficulté, ont rempli en grande partie leur objectif : seuls 20% d’entre eux avaient fait plus de deux ans d’études après le bac ». ça aurait été une manière plus honnête de présenter les choses, non ?

J’ai la chance de travailler dans le milieu associatif et je sais que les emplois-jeunes ont permis un développement économique des associations et l’embauche d’un grand nombre de personnes. Les 5 postes créés dans ma structure existent encore 12 ans après. Les statistiques au niveau national sont d’ailleurs assez parlantes : d’après la Dares, sur les 470 000 jeunes qui ont été embauchés, 75% avaient du travail à l’issue du dispositif, et 85% au bout de 18 mois dont 72% en CDI. C’est quand même pas mal, non ? Surtout quand on sait que lorsqu’on aide les entreprises privées (par des réductions de charges ou des aides à l’emploi), il s’agit assez souvent, pour les entreprises, de profiter d’un système avant de jeter les gens à la rue et de recommencer avec de nouvelles aides ou exonérations ! Et certaines entreprises qui ont bénéficié d’aides à l’emploi n’ont pas hésité ensuite à mettre en place des plans sociaux alors même qu’elles dégageaient des bénéfices. Donc, pour faire la morale, il faudra revenir … !

Il faut ajouter que ces emplois-jeunes, et d’une manière presque tous les emplois existant dans les associations, permettent de pallier les insuffisances de notre société dans des domaines tels que la santé, le social, la culture, l’environnement … Il y a beaucoup de misère dans notre société, il y en aurait infiniment plus sans les associations qui jouent le rôle de pare-feu.

Je ne sais pas ce que seront les emplois d’avenir annoncés par le gouvernement. Même si je ne peux qu’avoir un a priori favorable, je n’ai pas d’avis tranché sur la question car aujourd’hui peu d’employeurs, qu’il s’agissent d’entreprises ou d’associations, ont besoin de main d’oeuvre non formée. Je suis donc plutôt dans l’expectative (surtout quand on sait qu’aucun dispositif de formation ne vient accompagner le dispositif) !

Voila, j’avais juste envie de revenir un peu sur ces fameux emplois-jeunes trop décriés à mon goût.

14 réflexions au sujet de “Emplois jeunes et emplois d’avenir”

  1. Arnault, en demandant la nationalité Belge, cherche en fait à soustraire 13 milliards au fisc français sur les droits de succession.
    Et ceux qui râlent sur les emplois-jeunes qui ont coûté 15 000 euros par jeune et par an ne disent rien à propos de ces 13 milliards qui permettraient de financer 866 000 postes pendant un an !

  2. Certains emplois sont pérennisés mais certains jeunes arrivent en fin de contrat sans possibilité de suite alors qu’ils ont développé des compétences par eux-mêmes, souvent sans formations proposée durant leur contrat. Ils remplissent des fonctions nécessaires tels les auxiliaires de vie scolaire pour accompagner les jeunes handicapés à l’école. ils donnent entières satisfaction dans leur travail et se font jeter du système au bout d’1 an, 2 ans , 5ans ou 6 ans pour les plus chanceux.. Pas de considération pour eux, pour le travail accompli, pas de prise en compte de la relation engagée avec le jeune handicapé qui peut se retrouver très déstabilisé par la perte de son AVS.; jetés à Pôle emploi comme des mouchoirs jetables qui iraient à la poubelle. Quels gâchis alors que la société aurait tout à gagner à pérenniser ces emplois où les salariés gagnerait en expérience et en compétence pour accompagner les jeunes au plus près de leurs besoins. Je suis très agacée de cet état de fait. A quand une professionnalisation de ces auxiliaires de vie scolaire et une reconnaissance de leurs compétences et de leur capacité à s’adapter à chaque jeune et à chaque enseignant. C’était le coup de gueule du jour, car pas plus tard qu’hier, je me suis trouvée confrontée à cette situation qui met le jeune enfant de 7ans dans de grosses angoisses.

  3. Effectivement, je crois que la situation des emplois-jeunes qui ont été pris en milieu scolaire est bien différente de la situation dans les associations. Cela a été un véritable gâchis. Le CDD était de règle alors que pour les associations, le CDI était obligatoire.

  4. C’est une chose fausse de dire que les entreprises françaises ne sont pas compétitives.

    Prenons le problème là où il est :
    – La part des salaires a baissé de 10 points en 30 ans.
    – Par contre, celle des actionnaires …

  5. Un article bien documenté sur le travail, normal, c’est fait par de vrais journalistes !
    On y voit ce que sont les « bullshit jobs » et le « lean-management » : rien de bien neuf malheureusement, on est dedans jusqu’au cou.
    Pas encore d’issue à ce piège, mais on comprend mieux ce qui se passe, tout simplement parce que l’on y voit écrit avec simplicité ce qui n’est pas dit dans les médias dominants.

    http://www.bastamag.net/Intensification-du-travail-Le-patronat-et-ses-relais-politiques-sont-prets-a-l

  6. Je voulais faire un article sur les services civiques, une vaste fumisterie à mon avis, mais je n’aurai pas forcément le temps de le faire …

  7. Lorsque je jouais encore un rôle d’administrateur dans une association régionale, j’ai vu passer le CV d’un mec qui avait fait tout ça : doctorat, 4 stages de post-doctorant, divers stages & missions, service civique je crois (470,14 euros nets par mois).
    Tout ça pour gagner environ 1400 euros par mois avec une convention collective de ch. et un planning de malade. Cool.
    Le constat est affligeant : on peut avoir un parcours professionnel impressionnant, avoir travaillé pour l’Europe, l’Etat et sur des missions scientifiques d’envergure… sans avoir jamais obtenu un contrat de travail ni sans doute cotisé pour la retraite. Mais p’têt qu’il était passé à la télé ?
    Il paraît que notre toujours-président va consacrer la fin de son mandat aux personnes qui sont dans le besoin. A défaut d’avoir retrouvé sa feuille de route ou remis de l’ordre dans son cerveau, dommage que ses conseillers n’aient pas alerté ce pauvre homme plus tôt sur ses priorités : il se serait consacré à autre chose qu’à sa propre carrière.

  8. Comme je n’aurai plus le temps de faire un article sur le sujet des services civiques dont j’ai parlé ci-dessus, voici en gros ce que j’aurais aimé détailler.
    Lorsqu’il y avait un service militaire, ce n’était pas les appelés qui coûtaient cher à l’Etat mais bien l’infrastructure militaire qui était autour (les professionnels, les bâtiments, le matériel …). Dans le cadre du service civique il n’y a pas un centime prévu pour cela.
    Les services civiques touchent une poignée de cacahuètes : 400 euros et des bananes. Vu le cours officiel des cacahuètes et des bananes, ça fait pas lerche. Il est inadmissible de payer les gens aussi peu.
    Mais le plus grave, c’est que ces jeunes ne sont pas encadrés. Il n’y a rien de prévu à cet effet. Ils arrivent dans des structures (associations ou collectivités locales) et ne sont pas encadrés car l’encadrement n’est pas payé. Quelle association en France (vu les difficultés actuelles) aurait du temps à consacrer à cet encadrement ? D’autant plus qu’un service civique ce n’est pas pour remplacer un salarié, il ne travaille donc pas sur une activité marchande (c’est interdit dans l’esprit de la loi). Il ne rapporte donc même pas un seul centime à la structure qui l’accueille, au contraire il coûte. Et il coûte beaucoup. Alors, les gens qui disent que le service civique c’est un tremplin professionnel sont des doux rêveurs qui ne connaissent pas la réalité de terrain.
    Bien sûr, les journaux citent des exemples de jeunes qui ont découvert un univers associatif riche et qui ont pu ensuite se lancer dans la vie professionnelle. Mais c’est de la propagande. Pour une réussite, combien d’échecs ?
    J’ai eu l’occasion d’accueillir une jeune fille en service civique. Elle est arrivée au mauvais moment dans la structure (au moment où je suis tombé malade et où je n’ai été présent que par intermittence) mais de toute façon le peu de temps que j’aurais pu lui consacrer aurait été pris sur les fonds propres de la structure. On demande aux associations de suppléer une fois de plus aux carences de l’Etat.

Laisser un commentaire

:D :-) :( :o 8O :? 8) :lol: :x :P :oops: :cry: :evil: :twisted: :roll: :wink: :!: :?: :idea: :arrow: :| :mrgreen: