L’artichaut

LE COIN DU JARDINIER (22)
J’ai toujours eu une admiration sans bornes pour les jardiniers des derniers millénaires qui ont domestiqué les plantes sauvages et qui, au fil des siècles, les ont transformées en délicieux légumes. Qui sait aujourd’hui que l’artichaut n’était à l’origine qu’un chardon méditerranéen. Il a fallu une patience infinie pour améliorer l’espèce sauvage.

Il y a deux mille ans déjà, les romains en avaient fait une plante moins épineuse dont on épluchait la tige pour en manger le coeur moëlleux. Beaucoup plus tard, au XIIème siècle, les jardiniers de l’Andalousie musulmane ont porté leurs efforts de sélection, non sur la tige mais sur la fleur, et ont obtenu les premiers vrais artichauts, proches parents de ceux que l’on consomme aujourd’hui. Lorsqu’il pénètrent en France, vers 1530, ces nouveaux légumes seront considérés comme denrées de luxe. Un bon siècle plus tard, vers 1650, l’artichaut quitte les jardins nobles pour rejoindre les cultures de plein champ et être appréciés par les couches populaires d’une bonne partie de la France.

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Notons aussi qu’un autre légume très proche, le cardon, est issu du même chardon sauvage que l’artichaut mais aura connu au fil des millénaires des voies de sélection différentes, tout aussi longues et compliquées.

Les franc-comtois ont peu l’habitude de cultiver l’artichaut. Sa culture marche pourtant bien dans notre région. Il lui faut cependant de l’espace (1 mètre carré par pied), une terre riche, profonde et bien drainée.

Le point le plus délicat est le maintien en vie de cette plante pendant l’hiver. Il faut la protéger mais elle peut pourir facilement. Il faut donc la recouvrir de terre (ou de paille ou de feuilles mortes) très tardivement (en décembre) et la découvrir le plus tôt possible en fin d’hiver (quitte à la protéger de nouveau en cas de gel prolongé). Mais ça ne marche pas à tous les coups et lorsque vous croyez avoir sauvé vos artichauts, ce sont les campagnols terrestres qui les achèvent. Je ne réussis à les faire passer l’hiver qu’une année sur deux. Il faut parfois de la tenacité pour être jardinier.

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On peut multiplier les artichauts en repiquant les rejets (appelés « oeilletons ») qui poussent au pied de chaque plant. C’est la technique la plus habituelle. Je procède plutôt par semis, c’est une technique qui me permet d’avoir sur catalogue six variétés différentes dans le jardin. Cette technique du semis a comme inconvénient de produire parfois queques artichauts épineux mais permet par contre d’avoir des plants beaucoup plus résistants.

Si l’on oublie de cueillir quelques artichauts, ce n’est pas grave, ils produiront chacun, au jardin ou dans un pot, une fleur magnifique. C’était paraît-il la fleur préférée de Sigmund Freud.

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31 réflexions au sujet de “L’artichaut”

  1. L’artichaut et la salade
    L’asperge et la pastenade,
    Et les pompons tourangeaux,
    Me sont herbes plus friandes
    Que les royales viandes
    Qui se servent à Monceau… »

  2. Bernard, je lis dans le chapitre de Des légumes de Jean-Marie Pelt consacré à l’artichaut qu’on l’a longtemps considéré qu’il était aphrodisiaque, au point que les marchands des quatre-saisons, au temps d’Henri IV, criaient dans la rue : « L’artichaut, le bel artichaut, pour Monsieur et Madame, pour réchauffer le cul et l’âme !… »).

    Tu confirmes ?
    (…et as-tu perçu des degrés d’efficacité entre les 6 espèces que tu cultives ?)

  3. Nous avions loué un gîte en Bretagne et les propriétaires étaient également producteurs d’artichauts. Ils nous en ont offerts que nous avons goûté le soir même.
    Le lendemain, alors que nous les remercions en leur précisant qu’on les avait trouvés particulièrement bon, ils ses sont esclaffé :
    – vous les avez déjà mangé ?
    – ben, oui
    – et ça va ?
    – ben, oui, pourquoi ?
    – parce que les artichauts, on attend toujours deux ou trois jours après la cueillette pour les manger
    – ah bon, pourquoi ?
    – parce que sinon, ça donne une de ces diarrhée !

    Est-ce que les variétés que tu cultives ici ont cette même propriété ?

    (Je vous rassure, Joëlle et toi, ceux de dimanche n’ont eu, sur moi, aucun effet secondaire… mais je ne sais pas quel jour ils avaient été cueillis).

  4. L’artichaut aphrodisiaque ? Oui j’ai lu ça récemment.
    C’est d’ailleurs pour ça que je peaufine la méthode de culture de ce légume … pour être au point quand viendront mes 90 ans !!!

  5. Aïté Bresson écrit dans « l’encyclopédie du jardinier » que les artichauts que l’on cultive près d’Avignon et de Cavaillon dès 1530 et en Languedoc vers 1580 « sont encore bien petits, mais très prisés et rares : on les considère comme des denrées de luxe, on les offre précieusement, et on ne manque pas de leur attribuer quelques procédés aphrodisiaques ».

    Il ne semblerait donc qu’il ne s’agisse que de rumeurs. Il ne nous reste donc qu’à essayer de prouver la chose !

  6. Pour celles et ceux que ça intéresse, j’organise une petite soirée demain vendredi à 18H dans mon jardin sur le thème de la tomate. Au programme : histoire, mode de culture … et apéro aux framboises !

  7. Les artichauts, c’est un vrai plat de pauvre. C’est le seul plat que, quand t’as fini de manger, t’en as plus dans ton assiette que quand t’as commencé !

  8. C’est super de réhabiliter l’artichaut…Prince de Bretagne (zut ! c’est le chou-fleur !)…. mais à y regarder de près les Bretons n’y vont pas avec le dos de la cuiller pour les obtenir (l’un et l’autre). En effet on peut voir à la base de chaque pied une bonne poignée d’engrais qui va se dissoudre à la première pluie… et gagner la nappe, puis le littoral…
    Je sais que Bernard évite ce genre de pratique ce qui lui permet une espérance de vie de 90 ans avec le corollaire évoqué côté libido !
    NB : je profite de cette intervention pour signaler l’arrivée massive de l’AMBROISIE dans le Jura ; dans la vallée de la Bienne et jusqu’à Septmoncel et Cuttura. C’est inquiétant. Et le comble c’est que parfois les graines poussent au pied des mangeoires car elles se trouvent mêlées au tournesol qu’on donne aux oiseaux en hiver. On va devoir se méfier de tout, ou laisser crever nos Passereaux.

  9. Ton blog est intructif !
    Je n’aurais jamais imaginé que l’artichaud et le cardon étaient la même plante au départ …
    Et pourtant, en regardant la photo, ça saute aux yeux!
    Les feuilles se ressemblent énormément.
    Mais comme je n’avais jamais vu d’artichauds autrement que chez le marchand de légumes, je n’avais jamais pu faire la comparaison.
    En prime, je saurai maintenant comment est une fleur d’artichaud !

  10. Quand on a une véranda ou une serre, on peut semer l’artichaut dès le mois de janvier. On peut aussi le semer plus tard. L’avantage, quand on le sème en janvier (ou en février), c’est qu’il donne une production dès la première année.
    J’ai semé les miens cet après-midi. Et comme Dupdup ne fait pas les choses à moitié, il n’a pas semé une variété … mais huit !

  11. J’ai semé mes artichauts il y a une semaine, les premiers sortent ce matin. Dans quinze jours, je vais dédoubler mes plants qui sont en godets. Si quelqu’un qui habite près de chez moi en veut, je peux en donner quelques plants. Mais il ne faudra pas les mettre en terre avant la fin mars, il faudra donc les protéger d’ici là dans une serre, une veranda ou une pièce bien ensoleillée mais pas trop chaude.
    Et comme Dupdup ne fait jamais les choses à moitié, je crois qu’il y aura le choix entre 7 ou 8 variétés …

  12. Mes artichauts semés vers le 25 janvier ne sont pas terribles. Ils poussent dans le salon dans un endroit bien éclairé mais ils poussent trop vite avec peu de racines et se cassent dès que je veux essayer de les repiquer (j’en ai cassé cinq ce matin et je ne suis pas certain que les autres vont se remettre du repiquage). Je pense que la technique que je pratiquais l’an passé, à savoir les mettre dans la serre dès qu’ils avaient germé, était bien meilleure. Mais cet hiver est particulièrement froid, il gèle encore toutes les nuits dans ma serre, et il est encore trop tôt pour les y transplanter.
    Conclusion : mes premiers essais de 2009 commencent mal. Celui avec les artichauts est … raté !

  13. Ben, tu vois, j’ai réussi jusqu’ici, malgré le désir immense que j’en ai, à ne rien semer. Bien m’en aurait-il pris ? Chaque jour, je me retiens, c’est très dur. Vais-je finir par craquer ? L’an passé les semis de début mars ont été bien meilleurs que ceux de début février… Peut être parce qu’ils avaient la bonne taille de pousse au moment de leur mise en serre de balcon ?

  14. Oui, c’est comme l’amour : attendre un peu ne nuit en rien à son accomplissement. Au contraire.

  15. Ben c’est la même chose, bonne remarque.
    Les abstinents de la terre sont aussi suspects que des curés.

  16. Stéphane vient de nous dire qu’il joue demain dans un concerto pour clarinette de Artie Shaw. C’est pourtant pas la saison !

  17. C’est un bon jour aujourd’hui pour semer ses artichauts. Je viens donc de le faire avec six variétés : violetto du chioggia, Romanesco, Romagna violet, Vert globe, Impérial star et Gros vert de Laon.
    Ceux qui étaient en plein champ n’ont pas passé l’hiver. :angry:

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