Jan Garbarek et l’esthétisme ECM

Un petit dimanche musical proposé par Luc
C’est indéniable, historiquement, traditionnellement, le jazz, c’est une musique de noirs, c’est une musique d’américains. Elle trouve ses origines quelque-part dans le temps et l’espace entre la nouvelle Orléans et les champs de coton dans les états du sud des EU. Depuis près de cent ans, elle est un lieu d’expression d’identité raciale et culturelle. Elle porte dans son histoire les traces des tensions qui régissent les relations entre Noirs et Blancs, c’est à dire entre riches et pauvres, entre maîtres et serviteurs, entre sens et intellect.

Même si aujourd’hui, le grand brassage mondial a en partie fait son œuvre, même si le temps a construit maintes passerelles entre les deux parties, maintenant encore, un clivage existe, qui je l’espère, n’est plus un signe d’opposition mais au contraire une reconnaissance saine de l’existence de cultures multiples.

Aux États-Unis, le jazz, c’est d’abord la firme de disque Blue note (EMi), depuis 1939.

En Europe, c’est en Allemagne, en 1969, que va naître un première grosse maison d’édition de Jazz. Celle-ci trouvera dès le début de son existence, les moyens de cristalliser les spécificités du jazz européen, bien blanc, bien intellectuel diront certains, tellement froid diront d’autres que ce n’est plus du jazz. Pourtant, c’est avec un musicien Noir Américain, Mal Waldron que débutera l’aventure de la maison d’édition ECM (Edition of Contemporary Music).

Pourquoi un tel préambule ? Parce que Jan Garbarek, est un des musiciens phare de la maison d’édition ECM. Un chef de fil du son ECM, de l’esthétique ECM (*).

Vous n’aimez pas le jazz ? Essayez l’« ECM » !

http://www.youtube.com/watch?v=W7tM4-r7hHI&feature=related

Garbarek, c’est aussi ECM par son côté musique du monde. Il cultive l’art de s’entourer de musiciens venus du monde entier (et de tous les temps), d’intégrer à sa musique des sonorités lointaines sans pour autant nier son propre monde musical. On en trouve un magnifique exemple dans sa collaboration avec le quartet de musique ancienne « Hiliard Ensemble » (que j’ai mentionné dans le blog à la page Idée de cadeaux de noël 6, mais aussi ici, dans une collaboration avec Ustad Fateh Ali Khan).

Le petit Jan qui est né en 1947 à Mysen en Norvège, a depuis ce temps lointain enregistré près de 30 albums à son nom. Mais est-ce nécessairement dans ses propres albums qu’il s’éclate le plus? Je n’en sais rien. Ce qui est sûr par contre, c’est que moi je l’aime quand même un peu plus jazz, comme par exemple, toujours chez ECM, au service de la musique du contrebassiste Miroslav Vitous, avec Jack Dejohnette aux baguettes… Attention : musique.

http://www.youtube.com/watch?v=U5Txo3DhL_c

Je sais que sur ce blog, il y a quelques amateurs de jazz mais aussi encore beaucoup de monde à convertir. Alors, allons-y franchement.

En 1975, le pianiste Keith Jarrett enregistrait pour ECM, son fameux Köln Concert (**). Cette improvisation totale deviendra vite la meilleure vente de tous les temps de la maison d’édition.

Je vous propose une premier extrait, la totalité est facile à trouver partout sur le net.

http://www.youtube.com/watch?v=WFDb9oIw9xI

Je souhaite une toute bonne écoute aux petits veinard qui ne connaitraient pas encore ce morceau.

(*) le terme d’« esthétique ECM » est parfois utilisé par les journalistes ou même les musiciens pour qualifier un certain axe des productions ECM. À la clarté du son s’ajoute parfois en effet un parti-pris esthétique, qui met l’accent sur des climats intimistes, des tempos modérés ou lents, des œuvres de piano ou guitare solo, duos, trios, musique pour cordes, ou formation sans batterie. Les productions ECM sont pour ces raisons parfois qualifiées de « jazz de chambre ».
(**) The Köln Concert a été enregistré le 24 janvier 1975 par Keith Jarrett improvisant au piano lors d’un concert légendaire donné à l’Opéra de Cologne, en Allemagne, lors d’une étape de sa tournée européenne commencée en 1973. Keith Jarrett est revenu à de nombreuses reprises sur les conditions d’enregistrement de ce concert pour lequel il était dans un très mauvais état d’esprit, en manque de sommeil, et particulièrement irrité contre la qualité du piano qui n’était pas celui qu’il avait demandé. Jusqu’à la dernière minute il hésita à jouer et démarra le concert, à la surprise générale, avec les quatre premières notes qui reprennent le thème musical de la sonnerie de rappel de la salle de Cologne. La salle, passé un moment d’étonnement amusé, se laissa prendre par l’improvisation autour de ce thème et Jarrett réalisa l’un de ses concerts les plus importants.
Cet album a en partie ouvert les portes du jazz à un public qui n’y était pas habitué et connu un très grand succès populaire. Il s’agit de l’un des disques de jazz les plus vendus au monde et de l’album de piano solo le plus distribué de tous les temps avec ses 3,5 millions d’exemplaires vendus.
(source: Wikipédia)

21 réflexions au sujet de “Jan Garbarek et l’esthétisme ECM”

  1. Luc, la dernière vidéo que tu m’avais proposée ne fonctionnait pas, elle semble avoir été éliminée de Youtube les jours derniers. Je me suis permis de la remplacer par une autre … Désolé !

  2. Je me suis souvent demandé pourquoi les autres disques de Keith Jarrett n’avaient pas obtenu le même succès que « Köln ». Chacun des disques de Keith Jarrett est un véritable petit joyau, qu’il soit seul ou en trio. C’est l’un des musiciens de jazz que j’écoute le plus.

  3. Franchement , j’écoute exclusivement le jazz d’un monsieur … Oscar Peterson !!!
    Bon dieu depuis que je l’ai découvert grâce à ce blog … quel pied !!!!!

  4. Bernard, il me semble que les mélodies sont particulièrement attrayantes.
    Un peu comme les photos de la vidéo que tu as trouvée (largement inspirée de l’esthétique de Edward Hopper, non?)
    http://images.google.be/images?hl=fr&q=hopper&um=1&ie=UTF-8&sa=N&tab=wi
    Ça fait longtemps que j’aimerais lancer un truc du genre  » Les Lundi de la peinture »
    Je retourne dehors. Je n’ai pas l’impression qu’il va passer beaucoup de monde sur le blog aujourd’hui.

  5. Oui, Yves. Oscar Peterson n’a jamais été un précurseur. Mais il est certainement un des plus grands serviteurs de cette musique. Je l’écoute encore souvent. :smile:

  6. Effectivement, il fait si beau qu’il n’y aura pas grand monde sur ce blog.
    Je n’ai pris le temps de visionner que la deuxième vidéo. Je n’ai pas trop aimé l’intro, assez longue, mais le morceau décolle, et décolle plutôt bien, avec la voix de Ustad Fateh Ali Khan, au bout d’1’10 ». Ce dernier a été l’une des plus grandes voix du 20ème siècle. Le son du saxo est très (trop ?) bon.

  7. J’ai pas mal hésité avant d écrire ce commentaire …
    Vous allez vous moquer de moi peut-être ou me prendre pour une folle ?
    La première et unique fois où j’ai eu la sensation de quitter mon corps, c’était en écoutant Jan Garbarek. Je planais, comme un oiseau, au-dessus d’une immense étendue de terre gelée et plate, comme celle du grand nord. A mesure que j’avançais, les glaces défilaient sous moi. C’était absolument merveilleux.
    Je n’avais rien fumé, ni bu, je précise.
    The Köln concert …
    Je l’avais choisi comme musique pour mon diaporama sur la montagne Sainte Victoire :

    C’est le genre de musique dont on ne se lasse pas !

  8. Luc, tu parles dans ton article de Miroslav Vitous. J’ai eu l’occasion de l’écouter en concert à Besançon dans l’enceinte de la Citadelle en plein air. C’était un concert fabuleux. En tant que fondateur de Weather Report (il en fut le contrebassiste avant l’arrivée de Jaco Pastorius), c’est l’un des musiciens légendaires du monde du jazz.

  9. Que dire de Miroslav Vitous ?
    Que sa musique on la vit tous !

    Et celle du grand Keith Jarrett
    L’écouter, c’est pas demain qu’j’arrête !

    Et celle de Jack Dejhonnette ?
    L’écouter serait plus honnête !

  10. superbe morceau… J’en ai cherché un autre en live que j’ai écouté 100 fois. Il joue dans un église. Je n’ai retenu aucune référence…plus moyen de le retrouver. :sad:

  11. :angel:
    En parlant d’église … Voilà ce qui arrive lorsque Loretta Oliver prend le micro au milieu de la messe …. Bon dieu , ça fout des frissons !!!
    :w00t:
    Regardez cette joie , ce partage …. Bon , c’est vrai , ça n’est pas la même ambiance dans nos églises .

  12. Tu imagines, Yves, qu’il existe une expression en français qui dit « voir les choses en noir »? :blink: :tongue: Là, j’aimerais voir tout en noir! :biggrin:

  13. Bon je prends la parole un peu tard, mais absent tt le weekend et ce jour mon gamin a l’hosto pour une fibroscopie digestive. J’ai écouté qu’a 50% les vidéos. Merci à tous. Comme j’aime le DDJJJAAAZZZZZZ, pas de pb pour moi. Je l’avais oublié ce Garbarek, j’ai un disque avec Anouar Brahem, très coooollll. Merci Luc de cette redécouverte. Quand à la montagne Ste Victoire, la 1° image m’a fait penser au Mont Richmont , il manque plus que les têtes des 4 présidents. Je trouve qu’il y a la mm façade. Étincelle, prend ton burin.
    Qd a la dernière vidéo, j’aime ces couts de chaleur, car le gosse pèle.
    Qq peut me donner le titre ou l’album de cette vidéo d’Oscar ? Thank

  14. Le morceau s’appelle Cakewalk.
    D’après les info de la vidéo il s’agit d’un concert de 1985 à Berlin. Avec Niels Henning Oersted Pedersen à la basse et Martin Drew à la batterie. La discographie de Oscar Peterson comprend plusieurs centaines d’enregistrements dont le catalogue raisonné n’existe pas encore… Alors pour s’y retrouver…
    Si tu ne les connais déjà, Thierry, je t’invite à découvrir « Night train » de 1962, un classique. Mais surtout, mon préféré, de 1990 (donc plus proche de la vidéo de Yves) « live at the blue note ». Le trio d’oscar rencontre le guitariste Herb Ellis: F A B U L E U X.
    Dommage (et prudence) qu’avec le succès, Oscar Peterson se soit embarqué dans des genres assez douteux, comme l’accompagnement des grands orchestres, un peu musique de film, un peu musique de bal…

  15. Merci Luc. Oui j’écoutais Oscar d’une oreille distraite. Je vais m’interresser au titres que tu me donnes.

  16. C’est infernal, le nombre de concerts fabuleux enregistré au Japon…
    ’82, c’est encore une bonne époque. Je vais essayer de le commander.

Laisser un commentaire

:D :-) :( :o 8O :? 8) :lol: :x :P :oops: :cry: :evil: :twisted: :roll: :wink: :!: :?: :idea: :arrow: :| :mrgreen: