En quelques mois, le secteur entre Geneuille et Auxon a été complétement bouleversé par les travaux du futur TGV. Là où il y avait des prés et des champs se dresse depuis quelques semaines ce qui ressemble de plus en plus à un champ de bataille. D’immenses plaques de terres remuées et déplacées remplacent la verdure d’il y a quelques mois seulement.
Mais, et ce n’est là qu’une infime compensation, la roche décapée à nu par les travaux et la terre remuée ont des secrets à nous révéler. Le passé géologique de la zone nous apparaît au grand jour, encore faut-il un oeil aguerri pour interpréter ce que nous avons sous les yeux.
Bien que le TGV soit pour lui un véritable crève-coeur, notre ami Jean-Yves, qui habite à quelques centaines de pas du tracé, n’a pas résisté à l’envie de venir voir sur place ce que la terre pouvait bien accoucher comme révélations.
Au hasard de ses pérénigrations dans ce paysage quasi-lunaire, qui lui ont valu notamment de tomber sur des traces extraordinaires d’un écureuil ayant atterri dans la boue : UNE PHOTO. Ou plutôt une photo extraordinaire comme nous pourrions tous en faire, pour peu que nous sachions trouver un peu de poésie là où on ne s’attend pas à la trouver. Quelques feuilles éparpillées tombées au milieu d’un sol crevassé, quelques petites retouches minimes à l’ordinateur pour augmenter les contrastes ou bleuir la couleur des feuilles et nous avons là un magnifique tableau.
Nature morte ou au contraire nature qui s’affranchit de ses contraintes et de ses limites pour aborder le domaine de l’abstraction et de l’universalité ?

Je me souviens d’une émission télé vue il y a plus de vingt ans, où Paco Ibanez, chanteur espagnol, parlait de Léo Ferré et disait combien il était bouleversé par sa poésie. Je n’ai pas la mémoire précise de ses propos, c’était il y a tellement longtemps (Ah, Altzheimer, quand tu nous tiens !), mais il disait qu’à la sortie d’un spectacle de Ferré, il était capable de trouver de la poésie au moindre caniveau croisé sur le chemin.
Saurons-nous, comme Léo ou comme Jean-Yves, magnifier et transfigurer ainsi le réel et le porter au rang d’oeuvre d’art ? Ou la nature n’est-elle, par sa réalité même, qu’une immense oeuvre d’art dans laquelle nous pourrions puiser à l’infini ?







 








