LE COIN DU JARDINIER (6)
Les arbres fruitiers du jardin fleurississent. La semaine dernière, c’était les pêchers, c’est maintenant au tour des pommiers et des poiriers de fleurir les uns après les autres. J’aime beaucoup ce moment de l’année et je me demande souvent pourquoi les gens plantent des arbres exotiques d’ornement alors qu’un fruitier, c’est si beau ! Et en plus, ils donnent des fruits à l’automne !
Si j’aime beaucoup les vergers traditionnels avec leurs arbres de plein vent qui sont un élément irremplaçable du paysage, je dois dire qu’en tant que jardinier amateur, j’ai un faible pour les petits arbres, ceux que l’on appelle « espaliers ».
Ces arbres ont plein d’avantages. D’abord, ils donnent des fruits très rapidement, au bout de trois années seulement, alors qu’avec des formes plus classiques, il faudra attendre une dizaine d’années. Ensuite parce qu’on peut les tailler, récolter les fruits, … à hauteur d’homme, à hauteur des yeux, ce qui présente un avantage certain quand on a, comme moi, la fâcheuse idée de vieillir (et qu’on est de moins en moins à l’aise sur des escabeaux ou des échelles). Et enfin parce que sur un espace limité, on peut mettre un grand nombre de variétés différentes car on peut espacer les arbres de 1,5 m seulement avec deux mètres entre les lignes (alors qu’habituellement, il faut 8 mètres en tous sens). Mes 25 espaliers (25 variétés différentes) prennent ainsi peu de place.

Si les gens ne plantent pas d’espaliers en général, c’est d’abord parce que leur plantation est plus difficile (il faut installer des poteaux et du fil de fer car ces arbres, greffés sur des porte-greffes faiblement vigoureux, ont un système racinaire faible et doivent donc être palissés) mais aussi parce que leur taille est beaucoup plus compliquée. Alors que pour un arbre de plein vent, on peut se contenter de ne tailler qu’une fois par an en début de formation, puis tous les deux ou trois ans ensuite, les espaliers necessitent qu’on s’occupe d’eux plusieurs fois chaque année : d’abord pour former les arbres, les diriger pour leur donner la forme qu’on veut, souvent sur un seul plan, mais aussi pour attacher les branches, ajouter des baguettes verticales (de noisetier par exemple) pour y attacher les cordons …
Mais pour moi, ce surcroît de travail n’est pas un inconvénient, au contraire. Car à force d’intervenir en permanence sur ces arbres, on finit par bien les connaître, la moindre branchette nous est alors familière dans ses moindres détails, on s’y attache beaucoup. Un jardinier qui possède des espaliers leur porte en général beaucoup d’affection. Quand il va au jardin, il coupe en passant une petite branchette qui dépasse dans l’allée, il incline telle autre pour favoriser la mise à fruits sur cette branche … car sur les espaliers, il y a toujours quelque chose à faire, pour le plus grand plaisir de ceux qui, comme moi, ont le sécateur qui les démange en permanence.
Si vous aimez vous occuper d’arbres fruitiers, plantez des espaliers, votre plaisir sera alors multiplié par dix. Mais surtout ne les achetez pas, il vous suffit d’acquérir des jeunes plants de l’année (que l’on appelle scions) et de les former vous-mêmes. C’est alors un vrai travail de création.